#1205 ft Vicky || Why it hurts so much to be in love ?

Je rentrais à la maison comme une automate, prenant le chemin le plus long pour juste... Je ne savais même pas. Mes pas m'avait porté dans les rues sans que je ne contrôle ni la direction, ni la vitesse, me traînant comme une âme en peine. Dans ma tête se rejouait chaque seconde de ma vie ses dernières années. Ma rencontre avec Casey, mon crush pour lui, mes tentatives pour le séduire, notre premier baiser, notre première baise, notre première fois... Nos rapports toujours plus passionnés, nos disputes, nos tendresses. La musique, l'écriture. Je repensais à toutes les fois où j'avais cru mourir en le regardant, ne sachant plus comment respirer et toutes les fois où j'avais pensé me déchirer, tan le voir me faisait mal. La première fois qu'il avait amené Zoey, la première fois que j'avais réalisé que j'étais jalouse, que je l'aimais toujours. Les réprobations de Darcy, les inquiétudes de ma mère. Elle n'avait jamais vraiment rencontré Casey, le croisant rapidement quelques fois quand il venait me chercher. Je 'avais jamais vraiment dit à maman que je sortais avec lui, mais elle l'avait su. Le guitariste de mon groupe... Il n'y avait aucune raison que je le prenne par la main pour l'emmener loin de ma ère si je n'étais pas en couple avec lui... Si je n'étais pas son ex, par la suite. Elle avait dit quelques petites choses, mais rarement plus que ce qu'il fallait pour faire comprendre qu'elle désapprouvait. J'évitais le sujet, elle me le permettait. Ma brave petite maman.

Après plusieurs heures à marcher jusqu'à m'en déchirer les pieds, je franchissais l'entrée de l'immeuble où nous habitions avec maman. Je croisais la vieille voisine qui me regardait toujours avec désapprobation, trouvant sans doute mes tenues trop courtes, même quand je m'habillais avec ma mère à la maison. Oui, j'avais tendance à être plus sage quand maman était à la maison. Inutile qu'elle apprenne que sa fille est une traînée. Aujourd'hui, cependant, nulle trace de désapprobation dans son regard. Juste une profonde empathie. Avais-je l'air si brisée ? Je faisais tout, depuis plusieurs heures, pour recoller les morceaux, pour offrir à ma mère une image qui n'avait rien de celle qui était à l'intérieur. Visiblement, j'avais échoué. Je devais avoir autant l'air d'une épave à l'extérieur que je m'en sentais une. Logique. Tout était branlant. Chaque souvenir fissurait un peu plus mon cœur et mon esprit et menaçait de faire céder toutes les digues que j'avais soigneusement construite depuis la veille pour me protéger de... ça. La douleur... La douleur était insupportable. Et pourtant, je savais que les murs étaient toujours en place. Je savais que tout poussait fort, menaçant de faire céder toute la façade que j'avais tenté de construire pour affronter Casey. Et la douleur était déjà insupportable. Je savais qu'à la seconde où les digues céderaient, je ne serais plus rien. Juste un amas de larmes et de souffrance. Moi qui me foutaient des pleureuses des comédies romantiques...

« Maman ? », soufflais-je en poussant la porte de l'appartement, ayant à peine la force de fondre deux syllabes ensemble pour former un mot. Pourquoi est-ce que ça devait faire aussi mal ? Pourquoi voir le regard de ma mère, quand elle posa les yeux sur moi, fit tout s'écrouler ?

Je ne sais pas ce qui sortit en premier. Un sanglot déchirant, un gémissement douloureux, le cri d'agonie de mon cœur qui se brise... tout en même temps... Tout ce que je savais, c'est qu'à un moment, j'étais par terre dans l'entrée, les genoux en feu d'être tombé dessus, les larmes inondant absolument tout, de mon visage au haut de ma mère. Et la douleur n'était rien en comparaison de la douleur à l'intérieur. Celle qui faisait tomber les larmes en un torrent intarissable, transformant ma gorge en un amas de nœuds d'où ne sortaient que des sons, incapables de formuler un mot cohérent et déchirant chaque fibre de mon corps dans un insoutenable douleur. Je m'étais déjà cassé le bras, une fois. J'avais eu un mal de chien. Ce n'était rien, en comparaison de l'effondrement généralisé qui me secouait maintenant, dans les bras d'une mère qui ne devait absolument rien comprendre à ce qu'il se passait.

C'était tellement con, se mettre dans un état pareil pour un garçon, mais je n'y pouvais rien. J'avais le corps en feu et le coeur en lambeau. Comme si quelqu'un passait ma poitrine au scalpel, lentement, laissant mille et une petite coupure abrasive dans ma cage thoracique. Peut-être que c'était ça, après tout, avoir le coeur brisé. Peut-être qu'il se transformait en verre avant de se détruire et que chaque morceau devenait un rasoir vous déchirant de l'intérieur.

Je n'arrivais même pas à prononcer un mot, tant les sanglots m'arrachait tout son et tout souffle. La boule dans ma gorge n'avait jamais semblé aussi lourde. Est-ce qu'un jour j'allais pouvoir de nouveau respirer normalement ? Malgré les mots et les caresses rassurantes de ma mère, je n'en étais même pas certaine. J'aurais tout donné, pour au moins pouvoir la rassurer. Je voyais dans ses yeux, à la manière dont elle scannait chaque centimètre de mon corps, qu'elle cherchait une trace d'agression. J'aurais voulu lui dire qu'elle n'avait pas à s'en faire, que j'étais juste en train de me briser de l'intérieur, mais je n'y arrivais pas. J'étais juste une loque pleurant lamentablement sur son sort.

Je la sentis me relever, me conduire jusqu'au canapé, plus que je ne la vis me prendre dans ses bras. Il y avait trop de larmes, tout était flou devant moi. L'odeur, la force de l'étreinte et la chaleur de ma mère était tout ce qui m'empêchait de me disloquer totalement. Sans elle, j'aurais sans doute explosé physiquement, en réponse à l'explosion en moi. J'enroulais mes bras autour de sa taille, serrant fort, alors que je pleurais dans sa poitrine, comme si sur-stimuler tous mes sens avec ma mère, la personne la plus importante, la source de toutes mes sécurités, pouvait me sauver de tout ça.

Je restais effondrée encore plusieurs minutes, probablement des heures à ses yeux. Avant que les larmes ne se tarissent enfin. Avant que ma gorge soit à nouveau capable d'émettre un autre son que les gémissements de douleurs et de peine. « Personne... Personne ne m'a fait de mal, maman », soufflais-je quand je pus enfin retrouver l'usage de la parole, restant soigneusement au creux de son étreinte, là où j'étais le plus en sécurité au monde. « Personne d'autre que moi-même... » C'était la vérité. Du moins je le pensais. Je n'en voulais même pas à Casey. Il ne voulait pas de moi, après tout, au début. C'était moi qui avait tout fait pour le séduire. C'était moi qui avait initié tout cela. Tout était donc de ma faute. Quoi qu'on en dise. « Je sais que je ne devrais pas... Mais je l'aime tellement... J'arrive plus à respirer maman... Je n'arrive plus à rien... »

Et je recommençais, serrant un peu plus mes bras autour de sa taille, alors que je sentais ma gorge se serrer à nouveau, ma respiration devenir plus erratique. J'étais en train de paniquer. L'angoisse était littéralement en train de m'étouffer et mes poumons brûlaient à la recherche d'un air que je n'arrivais plus à avaler.

Pourquoi aimer si c'était ça l'amour ? Pourquoi se faire tant de mal ? Je ne savais même plus et pourtant, même avec toute cette souffrance, je savais que j'y retournerais sans sourciller. Parce que Dieu que je l'aimais cet homme improbable. Et dieu qu'il m'avait rendu folle à un point où je me sentais la reine du monde, prête à soulever toutes les montagnes de la Terre. Et maintenant, après avoir soulevé toutes les montagnes, c'était comme si le monde avait décidé de me le faire payer, me retrouvant à mourir à petit feu sous leur poids soudainement devenu ingérable.

Je suivais le conseil de ma mère autant que possible, essayant de calmer ma respiration. D'ignorer la brûlure intense dans ma gorge pour inspirer et expirer longuement et calmement, au même rythme qu'elle. C'était dur. Très dur. J'avais la panique au bord des lèvres et la gorge nouée, douloureuse. Suivre un rythme calme semblait insurmontable. Pourtant, après un moment à me forcer, à regarder ma mère et à essayer de la suivre, je récupérais peu à peu une respiration plus calme, mais non moins pleines de sanglots fréquents. De toute manière, j'étais persuadée que tant que je ne serais pas totalement déshydratée, je pleurerais encore et encore. Elle avait beau chasser mes larmes et moi essayer de les arrêter, mes yeux coulaient, sans doute tout autant que mon nez. Dieu, je devais être laide à faire peur. Reniflant un grand coup, je passais le dos de ma main sous mes narines pour essayer d'essuyer ce mélange dégouttant.

Je secouais la tête, me mordant la lèvre. « Je croyais... Je croyais qu'on pouvait le faire... Je croyais qu'on pouvait vraiment être amis. Ça fonctionnait. Zoey est arrivée et c'était... C'était okay. » C'était vrai. C'était okay. Du moins ça le semblait. « Elle est géniale, maman. C'est mon amie et je l'adore. Et il l'aime aussi. Je sais qu'il l'aime. Je le vois dans ses yeux... » J'avais tellement besoin de le protéger de la colère de ma mère. Je savais qu'elle allait tout lui reprocher. Elle était ma mère. Elle allait défendre son petit oisillon. Elle allait lui jeter toutes les pierres et je ne voulais pas. Je ne voulais pas qu'il soit le coupable dans l'histoire. Ça aurait été trop facile. C'était moi qui avais commis des erreurs dans toute cette histoire. Moi et moi seule.

Elle disait qu'elle pouvait tout entendre, mais pouvais-je, moi, tout lui dire ? « Je sais pas comment c'est arrivé. Je sais pas à quel moment j'ai perdu le contrôle... Mais je me suis rendu compte que je l'aimais toujours et j'ai voulu partir... Je peux pas rester dans le groupe si je l'aime. Je peux pas le voir tous les jours et pas... Merde j'ai déjà tellement fait de bêtises... », me coupais-je moi-même, un nouveau sanglot passant le nœud de ma gorge pour en sortir. « Mais il ne veut pas que je m'en aille. Il... Il dit que si je pars, il met fin au groupe. Il dit qu'aucune autre a le droit de chanter nos chansons. Il... Il... » Je gémissais, expirant en produisant un son de rage et de désespoir, secouant la tête. « J'peux pas... J'peux pas partir. C'est mes garçons, mon groupe, notre musique... J'ai pas envie de partir. Mais je peux pas rester. Je peux pas être là et ne pas le toucher, ne pas être dans ses bras... Pourquoi ça fait tellement mal, maman ? », demandais-je, d'une voix de petite fille, les larmes coulant abondamment sur mes joues et mon air désespéré.