La pièce était plongée dans le silence, on pouvait presque entendre les mouches voler. La lumière du jour transperçait les rideaux pour inonder l’endroit d’un faible halo lumineux. Seules les respirations des deux corps endormis dans un grand lit rompaient le silence assommant de la chambre. Une chambre de femme, à n’en pas douter. Des vêtements trainaient par terre, ceux d’une femme mais également ceux d’un homme. Dans un soupir ensommeillé, la demoiselle se retourna et passa son bras dans le dos du brun couché sur le ventre. Ce contact non prévu le réveilla, et Keith ouvrit un œil, encore à moitié dans ses rêves. Son regard se posa sur la jolie blonde endormie. Kelly, une femme qu’il avait rencontré la veille et qu’il avait fini par suivre chez elle pour laisser parler leurs corps ensemble. Ce n’était pas la première fois que le jeune professeur en psychologie terminait chez une inconnue. Il avait plutôt l’habitude de papillonner à droite à gauche dans les bras de tas de femmes différentes. La monogamie n’avait jamais été son truc, d’aussi loin qu’il se souvienne. A l’adolescence déjà, il collectionnait les filles comme certains collectionnent les timbres. Keith a toujours beaucoup trop aimé les femmes pour se contenter d’une seule dans sa vie. Cinquante pourcent de la population mondiale est de sexe féminin, il est bien loin de toutes les avoir rencontrées. Ca n’a jamais été son but, bien sûr, mais cela explique sa volonté d’en avoir toujours plus dans son lit. Cupidon ne l’a jamais frappé de sa flèche, peut-être que cela changera un jour, en attendant, il profite pleinement des plaisirs de la vie. Vivre dans le regret n’est pas dans ses ambitions.
Il se retourna pour s’allonger sur le ventre et s’étirer. Dans son mouvement, la demoiselle se réveilla à son tour pour lui adresser un sourire. Keith le lui rendit avant de la saluer. Il avait beau être un coureur de jupons, il n’en était pas moins poli et respectueux pour autant. Il n’est pas le genre de type à partir en pleine nuit après s’être fait plaisir. Il préfère profiter et quitter convenablement une femme, pour qu’elle garde un bon souvenir de lui. Il faut dire qu’il a deux petites sœurs qu’il aime plus que tout malgré les disputes qu’il peut avoir avec sa cadette qui a un caractère bien trempé aussi. Quand ils étaient petits, les cris fusaient entre ces deux là quand ils n’étaient pas d’accord. Chacun voulait avoir le dernier mot. Pendant ce temps, la plus jeune les regardait en câlinant une peluche. Leur père devait toujours hausser la voix pour les calmer. Ils étaient de véritables piles électriques, à courir partout, à se taper dessus, à embêter leur petite sœur. Malgré ça, ils étaient inséparables tous les trois. Ils aimaient construire des cabanes dans le salon avec les coussins du canapé et des couvertures ou dessiner ensemble, ou encore jouer dehors tous les trois. Dès que leur mère leur lisait une histoire, ils étaient tous les trois tellement attentifs qu’ils buvaient littéralement ses paroles avec de grands yeux émerveillés. On ne peut pas dire que les enfants Hamilton aient eu une enfance difficile, au contraire leurs parents étaient plutôt présents et attentionnés. Certes, ils ne roulaient pas sur l’or, mais Keith n’a jamais manqué de rien dans sa vie.
Kelly déposa un baiser sur la joue de son amant d’une nuit avant de se redresser sur les coudes et lui proposer un petit déjeuner. Keith étant un estomac sur patte, ne put résister, évidemment. Il était capable de beaucoup de choses pour de la bouffe, quelle qu’elle soit, il n’est pas difficile. La blonde sourit, contente d’être tombée sur un homme sympathique. Non seulement il était bon au lit, mais en plus, il avait accepté de prendre son petit déjeuner en sa compagnie. Il était presque à l’hôtel, sauf que c’était gratuit. Il se redressa pour s’asseoir au bord du lit et attrapa son boxer pour l’enfiler. Il se leva et s’étira une nouvelle fois alors que la jeune femme enfilait un t-shirt. Keith la suivit ensuite jusque dans sa cuisine où il s’assit à table pendant qu’elle préparait tout, le sourire aux lèvres. C’est bien connu, quand on passe une bonne nuit, on débute la journée de bonne humeur. Son repas terminé le psychologue récupéra ses affaires pour aller s’habiller. Au moment de partir, Kelly le retint un peu pour le remercier, minauder, et proposer un éventuel nouveau rendez-vous. Après tout, si elle voulait remettre ça, pourquoi pas ? Keith finit par quitter son appartement pour rejoindre la voiture. Il s’assit derrière le volant et jeta un œil au siège passager. Sur celui-ci trônaient diverses paperasses, des cours notamment mais également des notes sur ses patients. Keith était loin d’être le meilleur psychologue qui soit, il faut bien l’admettre. Il n’était pas toujours très attentif à ce que pouvaient lui raconter ses clients, ce qui était assez dommage quand on savait que c’était l’intérêt même de ce métier. A vrai dire, le jeune Hamilton n’avait jamais nourri le souhait d’exercer cette profession. A la fin du lycée, ses parents voulaient absolument qu’il fasse des études pour assurer son avenir professionnel mais aussi pour montrer l’exemple à ses sœurs. Il avait l’embarras du choix, pourtant, il ne voulait pas se lancer dans des études de médecine où plus aucun étudiant n’avait le moindre temps libre. Il s’était lancé dans des études de psychologie un peu au hasard. Heureusement qu’il a pu compter sur son intelligence et son aptitude innée pour l’observation pour valider son diplôme parce que niveau assiduité, ce n’était pas trop ça. Cela fait à présent deux ans qu’il exerce ce travail mais on ne peut pas dire que cela lui plaise réellement. En réalité, il s’ennuie. Ecouter des inconnus parler de leurs problèmes à longueur de journée, soyons clairs, ça l’emmerde. Alors pour parer à ce quotidien d’un ennui mortel, il a trouvé une solution. Donner des cours de psychologie à la fac. L’université accepta sa demande et voilà qu’il était également professeur depuis quelques mois. Etre devenu le centre d’attention était bien plus passionnant. D’autant plus qu’il y avait énormément de jolies étudiantes sur le campus qui étaient à peine plus jeunes que lui. Il sait l’effet qu’il a sur les femmes et il adore voir toutes ces petites étudiantes baver sur lui. Etrangement, les salles ou les amphis qu’il occupe pour dispenser ses cours sont toujours pleins. Ses collègues sont aussi très intéressants. L’une d’elles, Katherine Cortez, a particulièrement attiré son attention. Elle est canon, diablement canon mais elle est surtout lesbienne. Bon qu’elle soit en couple n’est pas réellement un problème. Mais du fait de son orientation sexuelle, Keith s’est mis en tête de tout faire pour la séduire et la faire changer de bord. Bien sûr, il n’est pas le genre de gars lourd, non. Il se montre sympathique, serviable, drôle… C’est dans ce genre de situation qu’il est content d’avoir fait des études de psychologie, ça l’aide beaucoup à cerner les gens plus facilement.
Keith attacha sa ceinture et mit le moteur de la voiture en route. Cependant, avant de s’engager dans la circulation, il tira son téléphone portable de sa poche pour envoyer un message à sa mère. Depuis que son père était décédé en 2016, il était l’homme de la famille. De ce fait, il devait prendre soin des femmes Hamilton. Il se préoccupait de sa pauvre mère qui vivait seule désormais. Elle qui avait toujours été entourée de sa famille, ce fut un véritable coup dur pour elle et chaque jour il prenait des nouvelles. Il sentait bien qu’elle n’était pas au mieux de sa forme et ça l’inquiétait. C’est pourquoi il s’efforçait de lui rendre visite le plus souvent possible. Son message envoyé, il posa son téléphone sur le siège passager et desserra le frein à main. Après un coup d’œil dans son rétro, il s’engagea dans la circulation pour rentrer chez lui. Arrêté à un feu rouge, son portable vibra. Un message d’Alex venait d’arriver, elle lui proposait une sortie pour le soir même. Alex, c’était l’une de ses deux meilleures amies. Il la connaissait depuis de nombreuses années. Ils s’étaient rencontrés au lycée. La jeune fille était arrivée à Melbourne depuis peu à l’époque et elle semblait avoir des difficultés à se familiariser à son nouvel environnement. Un jour qu’il la vit seule à la cantine, il s’installa à sa table pour lui tenir compagnie et faire connaissance. A force de discuter, ils se rendirent compte qu’ils avaient bon nombre de points communs. Ils sympathisèrent et mangèrent finalement ensemble tous les midis, pour finalement devenir amis et se voir en dehors du lycée. Ils sont pareils tous les deux, ils ont la même façon de voir les choses. Ils sont devenus proches au fil du temps à tel point qu’il leur arrive souvent de coucher ensemble. Il n’y a pas de mal à se faire plaisir, non ? Il y a quelques années, l’amie d’enfance d’Alex est arrivée à Melbourne également. Jess Crowley. Autre jolie brune au caractère explosif elle aussi. Alex fit les présentations et le feeling passa rapidement entre eux. Ils sont souvent fourrés ensemble tous les trois. Dès que l’un d’entre eux a un bon plan pour une sortie, il prévient les autres. Il leur arrive aussi de coucher ensemble Jess et lui. Parfois les trois en même temps. Meilleurs amis avec bonus, que demander de plus ?
Il prit le temps de répondre à sa meilleure amie. Il entendit un klaxon provenir de la voiture de derrière, sans doute pour lui dire d’avancer parce que le feu était passé au vert. Mais il s’en fichait, Alex passait avant, alors il leva son majeur sans détacher son regard de l’écran du téléphone. Ce n’est qu’après lui avoir répondu, qu’il se remit en route pour rentrer chez lui et prendre une douche. Il avait des tas de choses à faire comme préparer ses prochains cours, relire les dossiers des patients de l’après-midi, faire des courses. Mais il ne ferait rien de tout ça. Il se contenterait de se vautrer dans son canapé pour regarder des épisodes de Game Of Thrones.